13/01/14 Blues au ras des racines

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Down in the Woods

Un vieil homme secoue sa main, pour nous montrer comme le papillon s'y accroche.
Deux documentaristes hollandais, Saskia Rietmeijer et Bart Drolenga, sont partis dans le sud des Etats-Unis avec un projet sur les arts et la culture; comme c'est souvent le cas des meilleurs documentaires, le projet initial est passé à la trappe quand ils ont rencontré Willie King.
Paysan, activiste, bluesman, travailleur social, Willie King, décédé depuis, a fondu toutes ses facettes en un tout indissociable. Malgré la notoriété internationale qui l'a rattrapé en fin de vie, il est resté fidèle à sa communauté miséreuse d'Alabama. Le film suit cet homme généreux et intense de colère maîtrisée de festival prestigieux en juke-joint délabré, mais surtout de jeunes mères pauvres en handicapés mentaux, du champ du cousin à l'ancienne "grande maison" du boss. Inlassable, Willie donne un cours de guitare ici, enseigne la collecte des baies là, rit des anecdotes de son passé de distillateur clandestin, monte sur scène et danse. Ceux que nous rencontrons en chemin nous parlent de Willie; lui nous parle de communauté, et de nous.
Il nous chante qu'il a été terrorisé par un système implacable, il nous chante qu'il ne retournera pas à la plantation. Il nous chante surtout de le rejoindre dans les bois.
Un regard vital sur une Amérique profonde, qui si elle n'est pas éternelle dans sa violence et sa misère, ne le devra qu'à des hommes comme lui.

 

En première partie, courts-métrages de William Ferris

Né blanc dans le Mississippi de la ségrégation, le professeur Ferris a eu non seulement l'incroyable talent d'échapper à l'évidence du racisme culturel, mais la passion, l'imagination et la rigueur de devenir l'un des quelques grands spécialistes de la culture populaire noire du Sud. Couvert de titres de gloire universitaire, co-éditeur par exemple du massif ouvrage de référence (au sens le plus fort du terme) Encyclopedia of Southern Culture, William Ferris a été, et reste, pourtant avant tout un homme de terrain, un de ces grands collecteurs que la focalisation excessive sur Alan Lomax, auquel il n'a rien à envier, tend trop à occulter. Effaçant ses analyses derrière la parole et le visage de ses informateurs et amis, il nous a offert il y a quelques années une anthologie de ses 70 ans de rencontres dans le Mississippi, qui vient d'être traduite en français grâce au remarquable travail des Editions Papa Guédé sous le titre Les Voix du Mississippi : photos, extraits d'entretiens, mais aussi un CD d'enregistrements sonores et un DVD de films !
En effet, Ferris a été dès les années 60 l'un des pionniers autodidactes du cinéma sociologique et ethnographique, ce qui l'a d'ailleurs amené à être sollicité par la suite comme conseiller technique par des réalisateurs comme Tavernier (Mississippi Blues) ou Spielberg (La Couleur Pourpre).
Il nous a généreusement autorisé à projeter quelques-uns de ces documents sans équivalents.

 

 

Le Fanfaron, 6 rue de la Main d'Or, 75011 Paris

Entrée libre / chapo + conso